Un chaos gouvernemental pour la France : Entre démission, dissolution et destitution
- Arnaud Del Socorro
- 8 oct.
- 3 min de lecture
Le Lundi 06 octobre 2025, alors que cela fait moins de 24 heures que le gouvernement Lecornu est investi sous Emmanuel Macron, le Premier ministre remet sa démission auprès du Président de la République qui l’accepte : c’est le gouvernement le plus court de la Ve République française.
Si la France était déjà dans une situation politique et économique très instable, les dégâts n’en sont que plus forts. Le CAC 40 annonce une baisse de 2% depuis l’annonce de Sébastien Lecornu et le MEDEF est contraint de reporter son rassemblement à Bercy…

Les choix d’une démission express
Si la décision du Premier ministre démissionnaire semble inattendue, plusieurs raisons ont pourtant été avancées pour justifier d’un tel choix. En effet, pour Sébastien Lecornu, « les conditions n’étaient plus réunies » :
Premièrement, la rupture s’est faite percevoir avec l’abandon du 49.3 pour le vote du budget. Sébastien Lecornu a tenu à rompre avec l’habitude prise par les anciens Premiers ministres sous Emmanuel Macron, offrant par la même occasion un motif légitime en moins pour censurer le gouvernement.
Pour être précis, qu’est-ce que représente le 49.3 ? D’après la Constitution de la Ve République française, « Le Premier ministre peut, après délibération du Conseil des ministres, engager la responsabilité du Gouvernement devant l’Assemblée nationale sur le vote d’un projet de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale. Dans ce cas ce projet est considéré comme adopté, sauf si une motion de censure, déposée dans les vingt-quatre heures qui suivent, est votée ». Donc l’Article 49 alinéa 3, pour être juste d’un point de vue du droit constitutionnel, permet au Premier ministre d’adopter un projet de loi sans passer par le vote de l'Assemblée nationale qui peut toutefois censurer le gouvernement s’il juge la décision du Premier ministre tel un « passage en force » illégitime.
Deuxièmement, la culture du compromis n’est plus faite, chaque parti politique souhaitant imposer son programme sans condition aux autres, même sans majorité absolue à l’Assemblée nationale, ce qui crée un climat d’incertitude et de blocage décisionnel dans le pays.
Troisièmement, les intérêts partisans bloquent l’avancée d’un projet commun pour créer une politique pour tous les Français. Entre la vision des Présidentielles de 2027 et la soif d’obtenir enfin une majorité ou au moins de gagner quelques sièges à l'Assemblée nationale, il est clair que les partis politiques font des choix pour favoriser leur politique et leur influence dans l’opinion publique.
Des revendications multiples et affirmées d’un changement politique majeur
Au-delà d’une démission individuelle et d’un nouveau changement de gouvernement sous les mandats d’Emmanuel Macron, c’est un réel séisme dans la sphère politique qui se prépare. Démission de trop, les partis politiques de l’opposition saisissent l’opportunité et souhaitent proposer des mesures tranchantes pour bousculer l’échiquier politique actuel et prendre des mesures radicales pour la nation. Une situation de crise sur la durée a des conséquences de plus en plus importantes sur l’ensemble de la vie politique du pays et de ses citoyens qui sont les premiers à pâtir des lourdes conséquences.
D’un côté, le Rassemblement national (RN) sous l’égide de Jordan Bardella propose une nouvelle dissolution de l'Assemblée nationale pour débloquer la situation de non majorité pour les décisions législatives afin d’éviter une situation de blocage décisionnel ou d’alliances contre-nature pour voter les lois et obtenir la légitimité d’avoir un Premier ministre du RN, même si ce ne fut pas le cas pour le NFP après les résultats des Législatives de 2024.
D’un autre côté, La France Insoumise de Jean-Luc Mélenchon va jusqu’à requérir l’examen de la motion de destitution du Président de la République déjà signée par une centaine de députés.
Même au cœur du camp macroniste, les divisions semblent définitivement se creuser. Gabriel Attal, Président du Groupe Ensemble pour la République à l'Assemblée nationale, explique ne « plus comprendre les décisions du Président ». Edouard Philippe, ancien Premier ministre sous Emmanuel Macron et fondateur du Parti Horizons, fait lui aussi une annonce choc en proposant une « présidentielle anticipée » une fois le Budget 2026 adopté...
Une volonté importante de changement politique est donc en vogue et s’intensifie de jour en jour, la démission de Sébastien Lecornu étant l’étincelle embrasant les institutions et consolidant définitivement les oppositions en France.
Alors, un climat de quasi-chaos certes mais jusqu’à quand et pour quelle finalité ? Pour paraphraser le théoricien et conseiller politique italien Machiavel, la question maintenant est de savoir quelle fin justifiera les moyens à employer…
Sources :
Le Monde, 2025, Sébastien Lecornu : le discours du premier ministre démissionnaire en intégralité [en ligne]. Disponible sur : https://www.lemonde.fr/politique/article/2025/10/06/sebastien-lecornu-le-discours-du-premier-ministre-demissionnaire-en-integralite_6644796_823448.html [consulté le 06/10/2025].
Franceinfo, 2025, Démission de Sébastien Lecornu : "Un gouvernement de 14 heures, je n'en connais pas d'autres", analyse un professeur d'histoire politique [en ligne]. Disponible sur : https://www.franceinfo.fr/politique/gouvernement-de-sebastien-lecornu/demission-de-sebastien-lecornu-un-gouvernement-de-14-heures-je-n-en-connais-pas-d-autres-analyse-un-professeur-d-histoire-politique_7535266.html [consulté le 06/10/2025].


